Dans une performance oratoire qui a provoqué quelques moues sceptiques et peut-être même déclenché quelques rires étouffés, Saad-Eddine El Otmani, ancien Premier ministre et ex-secrétaire général du Parti de la Justice et du Développement (PJD), a jeté un pavé dans la mare en laissant entendre que les familles marocaines étaient en proie à une « menace existentielle » en raison de l’adoption de l’idéologie occidentale par le « courant progressiste » au Maroc.

Pour lui, le comité chargé de réviser le Code de la Famille devrait être confronté à un premier défi essentiel : déterminer si les familles évoluent vers le progrès ou s’enfoncent dans le déclin. S’inspirant de la situation des familles dans les pays occidentaux, le Docteur El Otmani et Mister Renard ont souligné lors d’un symposium intitulé « Perspectives de modification du Code de la Famille » que la famille, en tant que pilier fondamental de la société, représente « un principe cosmique et social, bien plus qu’une simple donnée religieuse. Aussi-est-il crucial de comprendre quelles révolutions certaines élites cherchent à imposer à cette vérité fondamentale ».

Selon lui, cette tendance a fait que la civilisation occidentale « se dirige vers l’inconnu, avec un certain nombre de prémisses culturelles aujourd’hui qui envahissent la planète dans une marée cherchant à noyer le monde et à le construire sur des bases où la rupture avec la révélation est primordiale, et cela en se contentant de soi-même, en se contentant de l’esprit humain, le privant de tout repère, en suivant ses désirs et en faisant tout ce qu’il veut sans aucune retenue ».

L’ancien Chef du gouvernement a également souligné que « le mariage entre hommes était interdit il y a cinquante ans seulement dans les lois occidentales et il est maintenant autorisé dans un certain nombre de pays, en raison de la tentative de priver l’homme de tout critère religieux« . Il considère que « ce dérapage est peut-être ce qui a conduit à tous les autres écarts, tels que la prédominance de la tendance individualiste qui a amené l’homme à se suffire à lui-même et à tourner autour de ses désirs, plaisirs, intérêts et à ne pas se soucier de ceux de la société et de l’intérêt de la famille« .

À l’appui de ses dires, El Otmani a cité des données officielles illustrant la prétendue « menace existentielle » pesant sur la famille occidentale, en mettant particulièrement l’accent sur la montée en flèche du taux de naissances hors mariage en France. Selon lui, ce chiffre est passé de 38% en 1994 à environ 63% aujourd’hui, d’après les données de l’Institut national français de la statistique et des études économiques.

Déclarant sans équivoque que la menace planant sur la famille marocaine, n’est pas une vue de l’esprit, El Otmani a fustigé les mémoires présentées par les cadres politiques et associatifs affiliés au « courant progressiste » au comité de révision du Code de la Famille, les accusant de « déformer les données et d’adopter une approche idéologique fermée aux réalités, plutôt que de chercher à résoudre les véritables problèmes de la famille« .

El Otmani a également critiqué le Parti du Progrès et du Socialisme (PPS) pour avoir réclamé l’interdiction et la criminalisation du mariage des mineurs, qualifiant cette proposition d' »exagération des phénomènes marginaux ». Il a dénoncé les efforts des partisans de la modernité débridée pour « minimiser les problèmes réels au profit de leur agenda idéologique ».

Dans un discours empreint de gravité, El Otmani a souligné que la référence islamique constituait la base de la famille marocaine et de sa préservation, affirmant que le Maroc était un Etat islamique. Il a fait référence à l’article 32 de la Constitution du Royaume, qui établit une approche islamique dans le traitement des problèmes de la famille, soulignant que « la famille fondée sur le mariage légal est l’unité de base de la société ».

Il a ajouté que les transformations survenues dans la famille traditionnelle dans toutes les sociétés « ont été le résultat de la pénétration du modèle occidental moderne. L’origine est que la société est construite sur la famille, et toutes les religions respectent cela, y compris le christianisme qui a contribué à la civilisation occidentale contemporaine. Les chrétiens au fil du temps se sont séparés de ces principes ».

Concluant sur une note alarmante, El Otmani a mis en garde contre les conséquences désastreuses d’une dégradation de la famille, affirmant que « si elle venait à disparaître, ce serait le chaos, un bouleversement de l’histoire humaine ».